OPTION FACULTATIVE  BAC 2003 et 2004: 
MUSIQUES DE BALI A JAVA

 

Gamelan javanais importé en France dans les années 1950

MUSIQUES DE BALI A JAVA

 


            « Mais mon pauvre vieux !  Rappelle-toi la musique javanaise qui contenait toutes les nuances, même celles qu’on ne peut plus nommer, où la tonique et la dominante n’étaient plus que de vains fantômes à l’usage des petits enfants pas sages… »   Claude Debussy (1862-1918) a Pierre Louÿs en 1895.

           
Leur conservatoire, c'est le rythme éternel de la mer, le vent dans les feuilles et mille petits bruits qu'ils écoutèrent avec soin, sans jamais regarder dans d'arbitraires traités. Et si l'on écoute, sans parti pris européen, le charme de leur « percussion », on est bien obligé de constater que la nôtre n'est qu'un bruit barbare de cirque forain. Claude Debussy

 

 

 

 

 

 

  I - GENERALITES SUR L’INDONÉSIE

 

 II - DEFINITION  DU GAMELAN

         
         A)  Définition - Origines

        B)  La place du gamelan dans la société indonésienne

 

III - DESCRIPTION DU GAMELAN

 
A)  Description des parties d’un gamelan
B)  Quelques exemples de gamelans

 

IV - QUELQUES ELEMENTS D’ANALYSE MUSICALE

 
A) Structure horizontale: l’analyse linéaire (la mélodie)

B) Structure verticale: les différentes couches instrumentales (le rythme)

 

 

 

 

I - GENERALITES SUR L’AIRE GEOGRAPHIQUE 

* L’île de Java et Bali font partie de l’Indonésie, un pays de plus de 150 millions d’habitants à très forte majorité musulmane (90%) 

* Plus de 3000 îles forment ce pays, dont les plus grandes sont Java, Sumatra et Bornéo. Si Java fait 1000 km de long et compte 85 millions d’habitants, l’île de Bali qui est juste à l’Est n’est grande que d’une centaine de kilomètres en son point le plus large et ne compte qu’un peu plus de 2 millions d’habitants 

* En plus de ces différences géographiques, les deux îles s’opposent principalement par leur religion: Java est musulmane alors que Bali est de religion hindouiste. Cela implique de nombreuses différences culturelles et la vie artistique, notamment musicale, s’en ressent.  

* «L’ouverture de Java au commerce international (maritime) dès le XIIème siècle y a entraîné l’adoption de l’islam (généralisée aux XVI-XVIIèmes siècles), avec une modification sensible des mentalités, de la vie sociale et artistique, qui toutefois n’a pas effacé les traditions antérieures. Bali au contraire est restées fidèle à l’ancienne religion qui mêle des éléments hindous aux croyances ancestrales dites animistes (…), et a conservé l’organisation sociale traditionnelle qui en découle, dont rituel et pratiques artistiques sont indissociables»  Catherine Basset dans L’Education musicale,  Bac 2003, page 31.

 

 

      

 

 

 

 

 

 

 

 

II - LE GAMELAN

 A)      Définition - Origines 

* Un gamelan est un ensemble instrumental traditionnel indonésien composé principalement de percussions: gongs, métallophones, xylophones, tambours, cymbales, mais aussi souvent de flûtes. C’est à dire qu’il n’est composé que de métallophones (catégorie des idiophones)  

 

 

 

 

 

   * Le gamelan est originaire d'Indonésie, plus particulièrement dans deux îles adjacentes : Java et Bali. L'origine ultime se situe à Java. Ce type d'orchestre représente, en fait, une forme élaborée des instruments que l'on trouve dans tout le sud-est asiatique, à savoir : gongs, carillons de gongs et autres percussions. 

* Très tôt dans l'histoire, Java était déjà très peuplée. Dès l'époque coloniale, la surpopulation de cette île est une cause d'émigration vers toute l'Indonésie. Par conséquent, le gamelan javanais a influencé les instruments de toute une zone qui comprend aujourd'hui l'Indonésie, la Malaysie et le sud des Philippines. 

* En outre, les Hollandais ont emmené de la main-d'œuvre indonésienne en Guyane Hollandaise, l'actuel Surinam. Ce qui fait qu’on retrouve des gamelans conservés dans un certain nombre de pays du monde.

 

 

    B) La place du gamelan dans la société indonésienne

* La musique de gamelan appartient à la culture où elle est née et ne repose sur aucune importation culturelle récente. Elle peut s’inspirer des éléments de la nature et notamment des chants de batraciens. Sur la piste n°1 du cd, (crapauds-buffles à Bali), on peut noter que la ressemblance est frappante entre les crapauds-buffles et les formules métriques courtes marquées par les gongs horizontaux de tessiture moyenne, tels ceux entendus dans le Beleganjur (piste n°2)

* Les origines de ce type d'orchestre et de sa musique sont obscures. Il s'agit d'une tradition orale, il n'existe pas d'archives écrites pouvant nous renseigner sur son histoire. Cette tradition musicale ne se base pas non plus sur les noms de compositeurs ou d'interprètes. Cette musique est l'œuvre de collectivités et non de personnalités. Le gamelan se joue à plusieurs et aucun joueur ne se distingue des autres ou n'a de rôle plus important que le reste. L'anonymat est naturel dans une musique qui demande à être nombreux pour la jouer. 

* La musique du gamelan, fait partie d'une culture où il n'y a pas d'art pour l'art, activité séparée des autres. Ici, la sculpture, la musique, la peinture sont comme une sorte de talent de tout le monde et un embellissement qui imprègne chaque activité. La musique est inséparable de l'organisation sociale, de la religion et des autres arts. Elle est particulièrement proche de la danse et autres arts de la scène. Il n'y a pas de séparation entre amateur et professionnel, classique et nouveau, rituel et divertissant.

* Théâtre, danse, naissance, mariage, mort, exorcisme, récolte, loisir, réception sont autant d'occasions de jouer du gamelan. On joue un gamelan dans un temple, dans un palais, dans une salle commune du village, le long d'un chemin ou à la plage lors d'une procession et aussi, aujourd'hui, dans des théâtres, des écoles et des studios.

  

 

III - DESCRIPTION DU GAMELAN

 

A)  Description des parties d’un gamelan:  On distingue les instruments à lames des gongs.

 

1a)  Les Instruments à lames posées

 

Les lames d'un instrument peuvent être en bronze, en fer, en bois ou en bambou. Elles sont arrangées à la manière d'un xylophone, toujours horizontalement. Quand les lames ou barres d'un instrument sont en bois, on parle de xylophone. Quand elles sont en métal, on parle de métallophone.

 

Instruments à barres ou lames clouées. Les barres clouées sont en bronze, fer ou éventuellement en bois.

 

 

 

Barres ou lames en métal

 

 

 

Barres en bois

 

 

 

 

1b)  Les Instruments à lames suspendues

 

        Les lames suspendues sont en bronze, fer ou bambou

 

 

  

 

2a)  Les gongs

  

Les gongs sont en bronze ou en fer. Ils ont toujours un bulbe central appelé peñcu en javanais et moñcol en balinais. C’est une protubérance ronde au centre du gong.

  

. 

 

* Grâce au bulbe, les gongs du sud-est asiatique donnent une note précise. Ils possèdent ainsi un potentiel mélodique que l'on exploite en les formant en carillons. Selon la hauteur de la note, le gong prend une forme différente. La tendance générale est que plus la note est haute, moins le gong est plat. Les gongs aigus sont généralement plus petits. Le peñcu est plus pointu, la paroi latérale plus profonde. La forme des gongs graves est concave alors qu'elle est légèrement convexe chez les gongs aigus.

 

 

  

Les proportions physiques des gongs de gamelans sont si variées que l'on découvre ici la plus grande profusion de formes de gong de toute l'Asie.

  

                Les gongs verticaux: le Peñcu est orienté de côté.

 

 

 

 

Les gongs horizontaux: le Peñcu est orienté vers le haut.

 

 

 

                Gongs multiples:  Joué par deux mains ou plus. Il peut jouer des mélodies.

 

 

 

  

B)  Quelques exemples de gamelans

  

 

 

Gamelan javanais double en bronze sans indication de provenance arrivé en France dans les années 50. Ce gamelan a souvent été prêté par l'ambassade pour des stages ou des concerts y compris assurés par des joueurs européens

 

 

 

 

 

Gamelan javanais slendro dans le style de Solo (Java central). Métallophones et gongs en bronze. Le gong ageng porte la mention Kyai Mantep, dont une traduction pourrait être 'Le vénérable à la parfaite consistance'. Après avoir été joué à Java, il a été acquis en 1999 auprès d'un revendeur de Yogyakarta par Robert Fonlupt.

 

 

 

 

 

Gamelan slendro de bronze de facteur inconnu, style de Cirebon (fin du 19ème siècle). Donné en 1887 à la France par M. Van Vleuten, Ministre de l'Intérieur des Indes Néerlandaises et conservé au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. Il figura sans doute en partie à l'Exposition Universelle de Paris de 1889. Transféré au Musée de l'Homme en 1933 (n° d'inventaire 33.52). Joué pour la 1ère fois en 1985 par un groupe d'amateurs français, il fut accordé en 1987. Depuis 1996, visible au Musée de la Musique dans la Cité de la Musique de Paris.

  

 

 

 

Gamelan javanais double (slendro et pelog) en bronze, originaire de Surakarta (Java central). De facteur inconnu, il date pour la majorité de ses instruments de la 1ère moitié du 20e siècle, vers 1930

 

  

 

Gamelan javanais slendro fabriqué en 1981 à Kota Gede près de Yogyakarta (Java central). Métallophones et gongs en fer et en bronze. Acquis en 1992 après avoir été joué à Java.

 

 

 

  

Gamelan javanais slendro, peut-être originaire des environs de Yogyakarta (Java central). Facteur inconnu. Métallophones en bronze et gongs en fer. Acheté par un antiquaire périgourdin, M. Dufau à Yogyakarta en 1997 et acquis en décembre 1998.

 

 

                Gamelan pelog du prince Yogyakarta  vers 1930

 

 

IV - QUELQUES ELEMENTS D’ANALYSE MUSICALE

 

* Chaque gamelan possède son propre accord, deux gamelans ne peuvent pas jouer ensemble, ils ne sont pas accordés de la même manière.  

* C’est celui qui tient le tambour qui décide des changements de tempo, c’est en quelque sorte le chef d’orchestre

 

 

 

A) Structure horizontale: l’analyse linéaire

 

* On observe deux échelles: slengro (7 notes) et Pelog (5 notes). Certains gamelans sont accordés en échelle slengro et d’autres en Pelog.

 

* Il n’y a pas de phrase mélodique dans le sens où elle pourrait imiter un chant. Il faut prendre les phrases mélodiques comme étant des conséquences des notes de l’accord particulier de l’instrument couplées aux rythmes des différentes parties de la colotomie (voir plus loin)

 

    Exemple n°2 du cd Beleganjur. Gilak jalan, musique de procession, Seka Gong Banjar Gamongang, Buading, Kaba Kaba, Tabanan, Bali, Indonésie

 

«L’ensemble portatif est formé d’un couple de tambours (direction), de paires de cymbales (polyrythmie), de gongs isolés (timbres marquant la métrique cyclique/colotomie) et d’une série de petits gongs à mamelons (mélodie). Chaque joueur ne frappe qu’un de ces gongs, donc qu’une note, ce qui suppose une coordination virtuose».

 

Dans cet exemple, on notera deux grands cycles (du début à 1’31 puis de 1’58 à la fin). Le premier cycle garde le même tempo alors que le 2e est en accélération progressive. La pièce est bâtie sur 4 notes (si - ré - mi - sol# - la en transcription). Les petits gongs horizontaux font ré - mi - sol# - la alors que les gongs verticaux font les notes ré et si, plus lentement.

 

 

B) Structure verticale: les différentes couches instrumentales

Rythmiquement, la musique de Gamelan est tout simplement binaire, avec des temps forts et des temps faibles. Elle s’organise autour de différentes couches rythmiques qui ont en commun une pulsation. Une première couche fait entendre des notes longues, une deuxième des notes la moitié moins long, une troisième la moitié moins long, etc… (voir schéma en dessous).

 

Au cours d’une même pièce le tempo peut changer, marquant ainsi les limites des cycles d’une pièce. Le gong le plus grave est important, il donne le début de chaque cycle. L’organisation de cette musique en cycle rythmiques s’appelle la colotomie.

 

 

 

VOCABULAIRE:

 

Peñcu (en javanais), Moñcol (en balinais): C’est la protubérance ronde au centre du gong (le bulbe)

Slengro: type d’accord de certains gamelans basé sur 7 notes

Pelog: type d’accord de certains gamelans basé sur 5 notes

Colotomie: Principe d’écriture qui répartit les différentes parties d’une pièce en cycles rythmiques

 

 

SOURCES:

               Article de Catherine Basset, Education musicale Bac 2003 et 2004

               "Musiques de Bali à Java", Catherine Basset, Actes Sud, 1995

               "Le gamelan javanais", Claude Dietrich, editions Lugdivine, 2003

                Article d'Eric Michon, IPR de l'académie d'Orléans-Tours, sur Educnet (www.educnet.education.fr/musique)