Messe en si mineur de Jean-Sébastien Bach
(1685-1750)
1) Héritages: Parmi les genres de la
musique vocale,
2) Liturgie: Cette messe de larges
dimensions (environ 2h) est écrite en
latin selon le rite catholique, bien que Bach soit protestant. En réalité,
cette messe dépasse les querelles religieuses et se situe au delà des clivages:
elle a plus de valeur artistique que liturgique.
3) Dates de composition: Cette
messe est composée de 5 grandes parties.
a)
Bach compose d’abord une première partie appelée
1- Missa qu’il
termine en 1733. Cette partie
contient le Kyrie et le Gloria. Dans le Gloria se
trouvent le Qui tollis et le Cum
sancto spiritu analysés plus bas.
b)
Le reste est composé de 1740 à 1748:
2 - Symbolum Nicenum
(dont Et incarnatus, et Crucifixus, analysés plus bas)
3 - Sanctus
4 - Osanna,
Benedictus, Agnus Dei
5 - Dona Nobis
Pacem
Credo in unum deum:
Patrem
omnipotentem, factorem coeli et terrae...
«Je crois en un seul Dieu Père
tout puissant, créateur du ciel et de la terre...»
*
Composé de 1740 à 1748
*
Fait partie de l’ordinaire de
* Il
y a deux parties: la première en la
majeur comporte un orchestre réduit
(violons
I et II), les cinq voix, et le continuo
(violoncelles et clavecin qui
accompagnent, ici entièrement en noires régulières).
* Le ténor expose un thème qui est le sujet
d’une fugue. La basse en expose la réponse
(même
thème que le ténor en imitation), puis l’alto, soprano I et enfin Soprano II
selon
le même
principe. Les premières notes de ce thème proviennent d’une mélodie de
chant
grégorien.
* La deuxième partie réintroduit tout l’orchestre, le
rythme est plus animé (le
continuo
n’a plus de noires régulières), elle commence en la majeur et se termine en
ré
majeur.
* Cette deuxième partie fait entendre la suite du
texte: Patrem omnipotentem, factorem
coeli et terrae... «Père
tout puissant, créateur du ciel et de la terre...»
Et resurexit tertia die secundum
scripturas
Et ascendit in coelum, sedet ad
dexteram Dei Patris
« Et
il [le Christ] ressuscita au
troisième jour [après sa mort] ainsi
que l’avaient prédit les écritures
Et il monta au ciel, s’assit à la droite
du Père »
*
Enorme contraste de caractère: l’orchestre réapparaît au grand complet dans un
mouvement rapide et une nuance forte (non écrite) pour exprimer la joie
à voir le Christ
ressuscité.
* Composé de 1740 à 1748
* Ré majeur, qui est une tonalité
traditionnellement utilisée pour exprimer la joie (c’est
aussi la tonalité relative de si mineur qui
est la tonalité principale de la messe).
* Un motif récurrent et plusieurs
épisodes forment cette pièce, en fonction du texte.
Agnus Dei qui tollis peccata mundi miserere
nobis
«Agneau de Dieu qui enlève les péchés du
monde»
* On prend traditionnellement le symbole de l’agneau
pour désigner le Christ. Car un agneau est doux, paisible, et se laisse porter
à la mort sans résistance. La musique se doit d’être douce, lente et affective.
* Composé de 1740 à 1748
* Fait partie de l’ordinaire de
* C’est un aria (un air)
pour voix d’alto à l’accompagnement très dépouillé: Violons I et II et
continuo.
* Tonalité de sol mineur. C’est la
seule pièce de cette tonalité dans toute la messe, et la seule tonalité avec
des bémols de toute la messe également.
*
L'entrée de la voix est précédée d'une ritournelle (petite mélodie
récurrente) qui, par nature, revient à chaque fois que la voix se tait.
Qui tollis peccata mundi, miserere nobis.
Qui tollis peccata mundi, suscipe deprecationem nostram «Vous qui
effacez les péchés du monde, ayez pitié de nous. Vous qui effacez les péchés du
monde, recevez notre humble prière »
* Cette pièce fait partie de
* La lenteur majestueuse et plaintive de cette pièce correspond bien à la supplication du fidèle envers son créateur.
* Cette lenteur et ce caractère sont exprimés par
une disposition spatiale de l’orchestre en quatre plans:
1) La régularité des noires de la basse (violoncelle et basse continue)
2) Entrée en imitation des
voix sur un motif d’accord parfait descendant
3) Un phrasé en «deux en
deux» des cordes (violons I, II et Altos)
4) Un contre-chant des deux flûtes en notes
rapides
* Les voix sont traitées en écriture totalement polyphonique sauf à la fin où elles interviennent toutes en même temps (homophonie).
* Il y a beaucoup de modulations. La pièce commence en si mineur et termine en fa# majeur (dominante de si m). Ces harmonies chargées renforcent la solennité et la gravité de la pièce.
Cum
Sancto spiritu in gloria Dei Patris. Amen.
«Avec le
Saint-Esprit dans la gloire de Dieu le Père . Amen.»
* C’est la dernière pièce de
* Le brio et l’éclat sont exprimé grâce à
un orchestre au complet avec tous les
instruments.
*
Elle est écrite en ré majeur, tonalité habituelle de la joie et de la lumière
dans les œuvres religieuses baroques (voir le Magnificat de Bach).
*
A noter le rôle très important des trompettes quant à la symbolique de
la joie et de la force.
* On y trouve trois sections:
1) Du début à mes. 37: grande introduction orchestrale dans laquelle les voix sont majoritairement traitées harmoniquement.
2) De mes 37 à 64: l’orchestre se tait et ne laisse la place qu’aux voix (entrées en imitation) et au continuo (basse continue).
3) De mes 65 à la fin. Réapparition progressive de l’orchestre. Les voix homophones (mes.68 et suivantes) ainsi que l’intervention des trompettes et les cascades descendantes des cordes (mes 76) produisent un effet saisissant.
Et incarnatus est de Spiritu
sancto ex Maria virgine
«Et il [le Christ] est l’incarnation de l’esprit Saint issu de
*
Composé de 1740 à 1748
* Un
orchestre réduit (uniquement les violons I et II et le continuo), et les cinq
voix.
Les violons font à l’unisson (ils
font tous les mêmes notes) le même motif très
expressif. Le continuo fait des noires
régulières.
*
Entrée en imitation des cinq voix sur un motif en arpège descendant.
*
Tonalité principale: si mineur mais la pièce se termine en si majeur (à cause du
ré#)
*
Pièce lente d’un recueillement extrême à la solennité marquée.
Crucifixus etiam pro nobis sub Pontio Pilato, passus et sepultus est
«Il [le Christ] fut crucifié pour nous sous Ponce Pilate, il a souffert
et il a été mis au tombeau»
* Il
s’agit d’un moment crucial dans la messe: la mort du Christ, exprimée
forcément
par une musique plaintive, très expressive,
douloureuse et triste.
*
Composé de 1740 à 1748
*
Orchestre réduit aux violons I et II, altos et Flûtes traversières I et II et
au continuo.
Celui-ci assure une base rythmique régulière
en noires régulières. Ce continuo est une
basse obstinée: il répète
invariablement le même motif chromatiquement descendant
exprimant la douleur et la mort du Christ
crucifié. Les instruments font tous des
blanches régulières, l’accompagnement
orchestral extrêmement statique permet aux
voix de contraster avec eux par un rythme
varié et animé.
*
Les voix répètent quant à elles le même texte: Crucifixus, toutes sur un motif
descendant, toujours pour exprimer la
douleur et la mort du Christ crucifié.
*
Progression tonale de mi mineur à sol majeur. La toute fin (4 dernières
mesures) est
symbolique: l’orchestre se tait, la nuance piano est écrite par Bach lui-même (ce
qui
est très rare, donc très important), et la
tonalité s’éclaire du sombre mi mineur à sol
majeur: ces éléments musicaux symbolisent
l’imminente résurrection du Christ.