Johannes Brahms
(1833-1897)
Geistliches Wiegenlied pour mezzo-soprano, piano et alto
n°2 Op.91 (1884)
Parmi les quelques trois cents
lieder pour piano et voix que Brahms a écrits, l’opus 91, tardif, contient deux
numéros seulement, mais de qualité tout à fait exceptionnelle. L’inhabituelle
présence de l’alto dans un lied permet non seulement d’étoffer le timbre de la
voix et du piano, mais aussi de citer en introduction et à chaque fin de
couplet le thème d’une ancienne berceuse allemande Joseph lieber, Joseph mein,
faisant référence à la lointaine technique du cantus firmus propre à
Dans
la nuit et le vent O
vous anges saints, Apaisez
les cîmes Mon
enfant sommeille. Ô
palmes de Bethléem Dans
les rafales du vent Pourquoi
aujourd’hui ? Bruissez vous si méchamment ? Ô
faites moins de bruit, Taisez-vous,
penchez-vous Doucement,
tendrement Que
les cîmes s’apaisent ! Mon
enfant sommeille L’enfant
céleste Souffre
grandes peines; Oh,
combien il fut las Des
douleurs de la terre A
présent qu’il dort Doucement
assoupi Son
tourment se dissipe Que
les cîmes s’apaisent ! Mon
enfant sommeille Froidures
cruelles Descendent
sur nous Et
de quoi couvrirai-je Les
membres du petit enfant ? Ô
vous tous les anges Qui
de vos ailes Traversez
les vents Apaisez
les cîmes ! Mon
enfant sommeille
Vous qui planez
Autour de ces palmes
In Nacht und Wind Dans la nuit et le vent
Ihr
heil’gen Engel O vous anges saints,
Stillet die Wipfel ! Apaisez les cîmes
Es schlummert mein Kind. Mon enfant sommeille.
Ihr
Palmen von Bethlehem Ô
palmes de Bethléem
In Windesbrausen Dans
les rafales du vent
Wie
mögt ihr heute Pourquoi
aujourd’hui ?
So
zornig sausen ! Bruissez vous si méchamment ?
O rauscht nicht also, Ô faites moins de bruit,
Schweiget, neiget
Taisez-vous,
penchez-vous
Euch
leis’ und lind Doucement,
tendrement
Stillet die Wipfel ! Que
les cîmes s’apaisent !
Es
schlummert mein Kind. Mon
enfant sommeille.
Der Himmelsknabe L’enfant céleste
Duldet Beschwerde; Souffre grandes peines;
Ach,
wie so müd’
er ward Oh,
combien il fut las
Vom
Leid der Erde. Des
douleurs de la terre
Ach,
nun im Schlaf, ihm, A présent qu’il dort
Leise gesänftigt, Doucement
assoupi
Die Qual zerrinnt, Son tourment se dissipe
Stillet die Wipfel ! Que
les cîmes s’apaisent !
Es
schlummert mein Kind. Mon enfant sommeille.
Grimmige Kälte Froidures cruelles
Sauset hernieder, Descendent
sur nous
Womit nur deck’ich Et de quoi couvrirai-je
Des Kindleins Glieder ! Les membres du petit enfant ?
O all’ihr Engel, Ô
vous tous les anges
Die ihr geflügelt Qui de vos ailes
Wandelt im Wind Traversez
les vents
Stillet die Wipfel ! Apaisez les cîmes !
Es
schlummert mein Kind. Mon enfant sommeille.
Sur un rythme ternaire souple et balancé propre à la berceuse, les quatre couplets, contrastés, se terminent tous par la même mélodie, comme les y invite le texte. Le troisième traduit les tourments de l’enfant céleste par un climat plus agité et sombre (fa mineur), avant que la ritournelle Stillet die Wipfel... n’apaise les malheurs de l’enfant. Le dernier reprend les mêmes éléments thématiques que le deuxième. En toute fin est redonnée à l’alto la citation initiale du thème de l’ancienne berceuse.