Voiles et
L'oeuvre pour piano de Claude
Debussy:
* Elle occupe une place centrale et
ne contient que des pièces de maturité.
* Même si le piano reste un instrument très chargé d'histoire, Debussy y
apporte une nouvelle approche du son: il ne s'agit plus de faire sonner le
piano comme un piano, mais de dépasser son timbre propre pour évoquer, grâce à
une palette très riche, des sonorités proches de la nature, des évocations orientales
ou légendaires. Debussy compose plus avec des sons qu'avec des notes, Le
phénomène de résonance lié à la pédale est très important.
* Un Prélude est à l’origine
(période baroque 1600-1750) une pièce de forme libre servant à introduire une
autre pièce.
* Composés en deux livres entre 1909 et 1912, les Préludes pour piano de Debussy reprennent -comme ceux de Chopin
(1810-1849)- la même disposition en 2 fois 12 du Clavier bien tempéré de Jean-Sébastien Bach et de Chopin, sans bien
sûr en conserver la logique tonale.
* Contrairement à Chopin, ce ne sont pas des instantanés psychologiques
mais des pièces visant à créer une atmosphère dépassionnée, à évoquer un
paysage. "Le statisme et la phobie
du développement discursif ont trouvé dans le prélude leur forme privilégiée"
V.Jankélévitch.
* Les préludes sont la plupart du
temps vides de personnages humains (éloignement du romantisme)
VOILES Livre I
n° 2
* C’est un véritable chef d’œuvre impressionniste. C’est un de ces préludes décrivant un objet humain enlacé, plongé et soumis aux éléments naturels. Ces voiles révèlent la forme d’un vent calme et doux qui, par essence, n’a pas de contours. Debussy a su rendre en musique l’immatérialité de ce vent.
* Cette pièce ne suit pas un déroulement
temporel. Il n’y a pas d’histoire, il s’agit juste d’un mouvement décrit en
dehors de toute référence temporelle.
* On retiendra trois éléments musicaux:
- Un motif de tierces descendantes (au tout début) qui parcourt toute la pièce
- Un si bémol grave constamment entretenu pour maintenir le halo de résonnance jusqu’à la fin
- l’utlisation de la gamme par tons, chère à Debusssy.
* Un véritable chef d’œuvre. Une légende raconte que l’on entend encore sonner les cloches de la cathédrale d’un village breton, Ys, près de Douarnenez, englouti par les eaux. L’idée de passé, de résurgence d’un monde ancien et caché par les eaux est merveilleusement bien rendu. Ce prélude observe un déroulement narratif (contrairement à Voiles), il s’y raconte la sortie du monument des eaux et sa retombée :
- Au début, dans une brume doucement sonore, des quintes et quartes -étalées sur un large registre- plantent les jalons de ce décor médiéval. On entend alors quelques tintements à peine perceptibles des cloches.
- Puis, peu à peu en sortant de la brume, la monumentale cathédrale sort des eaux, le carillon sonne magistralement.
- Les eaux glauques et froides recouvrent ensuite le monument qui s’enfonce en laissant entendre de lointains échos des cloches.
* Debussy utilise, dans les accords du début, des accords de quintes et
quartes en référence à l’harmonie moyennâgeuse de l’organum (première forme de polyphonie en
quinte parrallèles au moyen-âge),
afin d’évoquer l’idée de passé
de ce monument médiéval.
* Une large palette de nuances de pp à ff.
* Les accords ne s’enchaînent pas dans une logique tonale (dominante, etc...) mais sont utilisés pour leur beauté intrinsèque:
voir par exemple la suite d’accords de 7e de dominante page 42, 4e
système, mesure 2, 3, 4, 5.
* Très grande importance de la nature, en l’occurrence ici de l’eau qui conserve le monument mais qui le cache aussi.
* Importance de la résonance du piano. Celle ci s’accorde très bien avec la résonance de la cathédrale et de ses cloches.