TANGOS d'ASTOR PIAZZOLLA |
I ‑ Histoire
II ‑ Particularités mélodiques et harmoniques
III ‑ Particularités rythmiques
Avant d'être une musique elle-même, «Ie tango est une manière déjouer la musique (…) Ce qui fait le tango c'est une façon particulière de phraser, de respirer, de suspendre la mélodie, d'ornementer, d'accentuer, de placer les tensions‑détentes au bon end‑oit, tous vecteurs musicaux sans lesquels le tango n'est pas tango. Ainsi le tango prend beaucoup de liberté avec le rythme et le phrasé de la mélodie. L'une de ses libertés est d'anticiper de ralentir ou de faire traîner la mélodie par le son du bandonéon, effet qui lui vient peut-être des pas des danseurs traînant despieds» (M.Plisson, , dans L'éducation musicale supplément au n'505‑506)
Programme
détaillé des deux options Bac 2005
I - Histoire
«J'ai travaillé toute ma vie pour le tango. Maintenant j'espère qu'il va travailler pour moi. J'ai commencé à gagner de l'argent avec le tango à l'âge de soixante ans, j'en ai presque soixante-dix et j'ai encore beaucoup de projets. Je me suis engagé pour mes convictions, pour ma musique et je n'ai jamais souffert de la faim.
Beaucoup de musiciens ont eu une vie et une mort misérables sans savoir que leur musique avait été acceptée après leur mort. Moi, j'ai connu cette reconnaissance. Ma musique est jouée partout dans le monde. Il y a une mode du tango en Europe, mais on vient à mes concerts pour ma musique. Je suis né à Mar del Plata [ville portuaire à 300 kilomètres de Buenos‑Aires, en Argentine], j'ai grandi à New‑York et j'ai trouvé ma voie à Paris.. Mais quand je monte sur scène, le publie sait que je joue de la musique d’Argentine, la musique de Buenos Aires» A.Piazzolla en 1990.
Né en Argentine, donc, Astor Piazzolla émigre avec ses parents à New‑York où ils espèrent trouver de meilleures conditions de vie. «La 8e rue était très pauvre, c'était un quartier violent plein de gens affamés et en colère. J'ai grandi au milieu de gangs qui s'entre‑tuaient, il y avait des braquages et des morts tous les jours (...) toute cette violence et tous les sentiments que cette ville renferme se trouvent dans ma musique». C'est néanmoins également à New‑York que Piazzolla se familiarise avec Bach et la musique classique avec Bela Wilda, pianiste ancien élève de Rachmaninov. Il revient en Argentine en 1936 et s'installe à Buenos Aires comme bandonéoniste dans le célèbre orchestre Orquesta tipica (3 ou 4 bandonéons, plusieurs cordes, un piano et une contrebasse) , il commence alors à écrire des arrangements pour celui‑ci. A la faveur d'une bourse d'étude, il part à Paris dans le cours de Nadia Boulanger. Il apprend le contrepoint et la fugue. Revenu en Argentine il compose ses tangos dans le styler du tango nuevo, c'est à dire qu'il apporte ses propres inventions au tango traditionnel. J'écoute du tango depuis l'âge de huit ans et je reconnais que certains de ces grands musiciens ont influencé ma musique. Je les respecte parce qu'ils ont trouvé un style propre. Quand on crée, il faut avoir son propre style. Sans style, il n 'y a pas de musique».
II ‑ Particularités mélodiques et harmoniques
III ‑ Particularités rythmiques
a) La Habanera (qu'on appelle aussi "Milonga"
b) La formule rythmique 3-3-2 appellée aussi tresillo cubano (qu’on retrouve dans Scaramouche
de Darius Milhaud, voir cd)
c) La Samba (qu’on retrouve également dans Scaramouche de Darius Milhaud, voir cd)
ETUDE DE QUATRE TANGOS D’ASTOR PIAZZOLLA:
ADIOS NONINO – MILONGA DEL ANGEL –
MUERTE DEL ANGEL – FUGA Y MISTERIO
I - ADIOS NONINO
Tango compose en 1959 à la mémoire de son père.
On observe deux parties A et B, la première énergique en mineur et une deuxième mélancolique en majeur.
Thème de l’introduction:
Thème «nostalgique»
Version 1 (Sexteto Mayor):
a) Instruments: violon, accordéon, piano, contrebasse en pizzicato
b) Remarques: Ce tango montre à quel point seuls deux thèmes peuvent être à la base de parties au
caractère fort contrasté: énergique, emporté, nostalgique, lyrique
Une introduction énergique (voir thème plus haut) à tous les instruments à l'unisson
L'accordéon tient ensuite le thème mélancolique
Le violon prend le thème de manière douce, puis emportée
Grande cadence de piano d'allure improvisée
Retour du thème d'introduction sur un accompagnement vigoureux
Version 2 (Carlos Garcia):
a) Instruments: contrebasse, accordéon, flûte, batterie, piano
b) Remarques: la distribution des thèmes aux instruments change quelque peu, le rythme 3+3+2 est
ici plus présent que dans la première version.
II - MILONGA DEL ANGEL
Au milieu des années 1960, Piazzolla compose une suite en 4 mouvements dont Milonga del angel et Muerte del Angel
Le nom Milonga vient du rythme utilisé (le même que celui de Habanera).
Contrairement à Adios Nonino, le contraste de caractères différents est moins présent dans ce tango, quasiment toujours lent, sensuel et mystérieux
Version 1 (Soledad):
a) Instruments: piano, violon, contrebasse en pizzicatto, guitare, accordéon
b) Remarques: Tempo lent, rythme de habanera aux pizzicatti de contre basse, rythme 3+3+2 très
présent quasiment tout du long.
Version 2 (J.Carli):
a) Instruments: Grand orchestre: carillon, wood‑blocks, flûtes, clarinettes, contrebasse en pizzicato,
Accordéon, cordes, piano, cor, harpe
b) Remarques: Une orchestration plus riche dans la mesure où il y a plus d'instruments
III - MUERTE DEL ANGEL
Cette pièce fait partie d'une suite écrite par Piazzolla dans les années 1960, la même que Milonga del angel
Une seule version (J.Carli)
a) Instruments: Orchestre de vents et percussions: trompette, saxophones, tuba, cor, flûtes, clarinette basse,
hautbois, basson, percussions et carillon
b) Remarques: Forme ABA (rapide ‑ lent ‑ rapide)
A: De caractère décidé et énergique, cette partie débute par un solo de trompette sur le thème principal,
rapidement contrepointé par le tuba. Echange du thème principal entre les différents pupitres
B: Partie plus lente et lyrique. Solo de hautbois, accompagné par d'autres vents
A: Retour du thème de la partie A, avec son caractère décidé et énergique. On entend la formule
rythmique 3+3+2 vers la fin à 2’59 qui nous rappelle l'appartenance de cette pièce au tango
IV - FUGA Y MISTERIO
· Voilà un bel exemple de fusion entre de la musique savante et populaire: une partie fuguée (représentant la musique. savante) débute la pièce, faisant ensuite place à une partie plus spécifiquement tango. Des éléments dansants (rythmes décalés) se conjuguent à des éléments savants (fugue)
Version 1 (Sexteto Mayor):
a) Instruments: accordéon, contrebasse en pizzicato, flûte, alto, piano, batterie
b) Remarques: Ce tango comporte une partie fuguée suivie d'une partie rapide et d'une partie lente
Partie fuguée: Entrée successive en imitation de l'accordéon, alto, flûte et piano sur ce thème, appelé sujet dans une fugue. L'imitation du même thème à un autre instrument s'appelle la réponse.
- A part la tonalité de mi mineur, noter l'antécédent du thème (2 premières lignes) et son conséquent (2 lignes suivantes)
- Les notes entourées correspondent aux endroits où une percussion est jouée. On remarque que celle‑ci intervient sur une métrique totalement asymétrique, dans le but de casser la régularité rythmique de la mesure à 4 temps. L'intervention de cette percussion est toutefois régulière (O=joue N=ne joue pas) ONO NNNNN / ONO NNNNN où chaque N ou 0 est une croche.
Partie centrale:
- Après un break de batterie vient ensuite une partie plus réellement tango, à 1’29
‑ Le thème de la fugue revient à l'accordéon et l'alto sur un rythme 3+3+2
Partie finale:
‑ Une coupure nette introduit la dernière partie, lente et mélancolique dans laquelle l'alto puis l'accordéon se partagent une ligne mélodique mélancolique, sur des pizzicatos de contrebasse. Noter la pédale de tonique (mi) à la toute fin, à la contrebasse (à partir de 3’07)
Version 2 (Violoncellistes de l’orchestre philharmonique de Berlin) :
a) Instruments: 12 violoncelles
b) Remarques: Cette version propose la même structure que la précédente. Seul le thème de la partie lente finale change.
Partie fugée : 4 entrées sur le sujet, les deux premières avec des «violoncelles percutants»
Partie centrale (1’36) : certains violoncelles assurent la partie pulsée (dans le grave), pendant que d’autres font la partie «tango»
Partie lente : après une série d’harmoniques (voir lexique). Le thème d’origine est respecté
Partie finale : Contrairement à la version Sexteto Mayor, on retrouve à la fin la partie centrale animée
Sources complémentaires:
Articles de Michel Plisson, Helena Rüegg et Ricardo Mosner dans l'Education Musicale septembre/Octobre 2003, supplément au n°505/506, Bac 2004